Le climat de la côte belge, partie 2 - en hiver
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- Publication : dimanche 19 février 2006 00:00
- Écrit par : Administrator
Niveau : initié
Après un aperçu global des caractéristiques générales du climat maritime et du climat côtier, il convient d'analyser le climat de la côte belge en hiver.
La côte belge connaît beaucoup de situations atmosphériques particulières, mais seuls les principaux cas seront envisagés.
Perturbations atlantiques
Normalement, le climat de la côte devrait être pareil à celui de l'intérieur des terres en hiver puisque l'intérieur des terres est plus froid et que la brise de terre devrait souffler en permanence. Or, rien n'est moins vrai. Il arrive même souvent que l'air vienne de la mer, pourtant plus chaude, en plein hiver.
En effet, la circulation atmosphérique générale prévaut en général sur les vents locaux en hiver. La situation atmosphérique la plus fréquente est celle des perturbations atlantiques qui nous viennent de l'ouest et qui circulent entre l'anticyclone des Açores et les dépressions au nord de l'Atlantique, dont la dépression mère est souvent située près de l'Islande.
Normalement, les zones de pluie se succèdent sur nos régions, entrecoupées de périodes plus claires mais plus instables avec des averses. C'est une succession de fronts chauds et de fronts froids, avec des températures qui dépassent parfois 10°C, notamment dans les secteurs chauds des perturbations.
Photo: M.-L. Vanhoorde
Le vent au sol souffle alors de sud-ouest, donc une direction plus ou moins parallèle à la ligne côtière. En raison des frottements moindres, le vent a tendance à souffler plus fort à la côte. Ce temps pluvieux et venteux est typique. Et pourtant, il pleut (un peu) moins à Ostende qu'à Bruxelles. Ceci est essentiellement dû au passage plus rapide des perturbations, qui ont moins de temps pour déverser leurs précipitations. Le temps y est légèrement plus ensoleillé aussi, en raison d'une fréquence un peu moindre de stratus bas.
Tout porte à croire que la température y est plus élevée aussi, mais ce n'est souvent pas le cas. L'air atlantique, en effet, est plus chaud à la source que l'eau de la Mer du Nord. Et comme la mer absorbe plus de chaleur que la terre ferme, l'air au contact de la Mer du Nord se refroidit un peu plus malgré le fait que les terres soient plus froides. Mais leur pouvoir d'absorption de la chaleur est moindre, ce qui fait que l'air, dans un premier temps, y reste plus proche de sa température d'origine.
Il est typique de constater, en hiver, que la zone à températures les plus douces se situe sur une ligne allant de Dixmude à Zelzate en passant par Bruges. Plus à l'Ouest, il fait plus frais en raison de la mer, plus à l'est, il fait plus frais aussi puisque la terre froide, à la longue (donc lorsque le trajet de l'air y est plus long), refroidit à nouveau l'air. Un tableau synoptique classique est: Ostende: 10°C, Zelzate: 11°C, Uccle: 8°C, Bierset: 7°C.
Air polaire
Lorsque le vent souffle du nord, la zone la moins froide se trouve à nouveau sur le littoral. Il s'agit dans ce cas d'air polaire direct, à l'origine plus froid (et non plus chaud) que la Mer du Nord. Dès que cet air quitte l'eau et sa source de chaleur, le réchauffement cesse aussitôt et l'air, au-dessus de la terre ferme, tend à retrouver sa température d'origine, donc polaire.
En cas d'air polaire, l'air est surtout très froid en altitude, de l'ordre de -10°C à 1500 mètres et de -20°C à 3000 mètres. Sur mer, en début d'hiver surtout (température de l'eau à 9, voire 10°C), cet air se réchauffe à sa base jusqu'à 4 ou 5°C. Ceci fait qu'on arrive à un seuil d'instabilité (presque) absolue jusqu'à 1500 mètres d'altitude et, l'humidité aidant, les averses sont très nombreuses et très intenses, avec des rafales de vent.
Photo V. Labrune
On observe typiquement de la pluie froide et de la grêle à la côte. A l'intérieur des terres, le refroidissement se fait rapidement, les averses perdent un peu de leur énergie mais tombent sous forme de neige. Il arrive souvent que le pays entier soit recouvert de neige (si l'air polaire est vraiment direct), à l'exception d'une mince bande côtière. Plus tard, en février, la neige a un peu plus de chance de tenir à la côte aussi.
Air continental
Par air continental, le climat côtier dépend de la direction du vent.
Par vent de nord-est soutenu, il fera nettement plus doux à la mer, mais plus nuageux aussi, en raison du parcours de l'air sur une partie de la Mer du Nord. Si le vent de nord-est faiblit, la brise de terre a tendance à se manifester et la composante donnera un vent d'est.
Lorsque le vent souffle de sud-est ou de sud, la côte a habituellement affaire à un flux d'air doux, mais refroidi à la base par le continent (inversion).
La côte belge, par sa géographie, est particulièrement favorable aux inversions. Les polders sont plats, se refroidissent facilement mais fournissent aussi de l'humidité, qui risque de se transformer en brouillard ou en stratus. Cette humidité se combine alors à l'humidité résiduelle de la mer (que le vent de sud-est n'aura pas tout à fait réussi à repousser vers le large), ce qui rend difficile la dissipation de ces brumes. Et même si les brumes se dissipent, la mince couche d'air humide et froid ne s'évacuera pas, maintenant ainsi l'inversion.
Photo: D. Caudron
En fait, l'inversion existe dans ce cas dans les autres régions du pays aussi, mais sera plus marquée à la côte. Donc c'est le cas d'espèce où il peut faire nettement plus froid à la côte même en hiver, l'air doux de la mer étant repoussé vers le large.
En résumé:
En moyenne, il fait plus doux à la mer qu'à l'intérieur des terres en hiver, mais il existe de nombreuses exceptions à la règle.
La pluviosité est légèrement moindre, mais surtout en cas d'air doux en provenance de l'Atlantique.
Par air polaire maritime, les averses sont plus fortes et donnent aussi des totaux pluviométriques plus marqués, en dépit du passage plus rapide des averses.
Par air continental (vent de nord-est), il peut y avoir quelques averses de neige côtières qui meurent très vite à l'intérieur des terres où il fait trop froid dans ce cas.
L'insolation est légèrement supérieure à celle de l'intérieur des terres. S'il est vrai qu'en cas d'inversion par air continental, les stratus y ont plus de mal à se dissiper, par air maritime par contre, les stratus se forment surtout à l'intérieur des terres où ils restent coriaces dans les secteurs chauds des perturbations, alors que la grisaille s'évacue mieux à la côte.
Le vent est presque toujours plus fort à la côte qu'à l'intérieur des terres en hiver. En raison du frottement moindre, la force de Coriolis s'applique mieux en mer que sur terre, où le ralentissement dévie également l'air. Un vent de sud-ouest à l'intérieur des terres soufflera souvent d'ouest à la mer, et un vent de nord à l'intérieur des terres y soufflera de nord-est. Ceci ne s'applique pas pour les vent d'est, de sud-est ou de sud puisqu'ils viennent de l'intérieur des terres et l'effet de la mer est alors annulé. Dans ce cas, ce n'est que plus au large que le vent changera de direction en raison de la diminution du frottement.